C’est en 1949 qu’André Roussin écrit « Nina », une comédie drôle et touchante dont le sujet n’a rien perdu de sa jeunesse : l’aventure amoureuse d’une femme, d’un époux et d’un amant. A l’affiche, Mathilde Seigner, François Berléand et François Vincentelli se sont emparé du Théâtre de Beausobre à Morges le 26 mars dernier.
Un jeudi soir à Beausobre, la salle est comble. Un air de samba couvre le brouhaha et le jour filtre sous le rideau. Puis se révèle un décor rougeoyant, une garçonnière où le lit trône en maître. Alangui sur les draps léopards, un homme au téléphone alterne commandes de fleurs et beaux discours. Car Gérard est un séducteur, qui sait charmer les femmes mariées et jongle comme personne avec ses triples, quadruples vies.

Mais Gérard est las de cette vie compliquée, las du mensonge permanent, de cette prétendue faiblesse face aux femmes. Lorsqu’Adolphe – sublime François Berléand – fait irruption chez lui pour supprimer l’amant de son épouse adultère, Gérard craque et lui avoue son envie d’en finir avec cette vaine existence. Puis arrive Nina, la Femme, une Mathilde Seigner à la fois langoureuse et énergique, mariée à un homme qui ne sait aimer, amoureuse d’un autre qui n’en vaut guère plus. S’ensuit un trio pathétique et comique en vase clos, où l’époux s’attendrit de l’amant, tous deux mis à mal et révélés par la verve fraîche mais assassine de Nina…
Une pièce légère, tendre et cruelle à la fois, dont Bernard Murat a su respecter la temporalité en signant une mise en scène fidèle et désuète : tentures, lumières tamisées, moquettes fanées, costumes d’époque… Malgré le jeu monotone mais charmant de Mathilde Seigner, malgré l’absence de réel climax et la relative platitude du scénario, c’est le sourire aux lèvres et le cœur effleuré que l’on revient à soi, dans un monde où tout a changé sauf l’essentiel : l’amour, les amours.
Texte: Ophélie Thouanel