Théâtre Le Poche, le 25 mars 2015
« J’ai rencontré Henry Miller. […] Voilà un homme que je pourrais aimer. » (Anaïs)
« Anaïs, je croyais t’aimer, avant ; ce n’était rien à côté de la certitude que j’en ai aujourd’hui. » (Henry)
Au cœur de la Vieille-Ville, c’est toujours un plaisir de se rendre au théâtre Le Poche, où l’accueil est chaleureux et intimiste. Une fois les billets en poche, justement, descendez les escaliers pour boire un verre avant la représentation. Puis, à l’heure dite, remontez dans la salle, qui sera certainement bien remplie.
Vous assisterez peut-être à l’adaptation de la correspondance sulfureuse entre Anaïs Nin et Henry Miller. A comme Anaïs revient, grâce à Françoise Courvoisier, sur des lettres rédigées en 1931 et 1932. C’est une histoire amoureuse complexe et sans tabou qui se joue alors, entre les deux auteurs mariés respectivement à Hugo et à June.
Très sexualisé, le texte nous apprend que les plaisirs charnels ne font pas peur à Anaïs, tandis qu’Henry dit même baigner dedans. Elle aime être soumise, il aime la dominer. Ils s’enlacent sur un lit, sur une table ou à même le sol, dans une étrange complicité. Pourtant, leur aventure s’entrecoupe de longs moments de solitude, lors desquels ils iront peut-être se consoler ailleurs… Pas non plus d’accord sur tout, Anaïs trouve que sa rencontre avec June tient du miracle, tandis qu’Henry compare cette dernière à un cadavre à traîner derrière lui.
L’histoire est intéressante, historique, intellectuelle même. Olivia Csiky-Trnka et Frédéric Landenberg tiennent tout à fait les personnages, qui s’emportent dans un tourbillon de passions. Ivresse et tendresse s’entremêlent tant et si bien qu’il n’est pas forcément aisé de distinguer avec clarté le réel de l’imaginaire, le fantasme du tangible.
Parfois elle balbutie, se précipite ou attend. Parfois il nous parle en tournant le dos, ramasse un objet tombé dans l’agitation ou rallume une cigarette. Parfois, on entend l’air d’une boîte à musique, qu’on pourrait presque prendre pour une sonnerie de téléphone. Un brin décontenançant.
Pourtant l’éclairage est adéquat, l’occupation de l’espace excellente, l’aménagement recherché. Mais les lettres et les événements s’enchaînent très rapidement, ne laissant pas toujours le temps d’exhaler. Ainsi immergé dans un dialogue entre mensonges et vérités, entre accords et désaccords, le public a pourtant le temps de rire à d(‘)étonnants traits d’esprits piqués au cœur du mélodrame.
Si vous souhaitez assister à la renaissance de deux grands noms de la littérature joués par des acteurs inspirés, alors dépêchez-vous de regarder s’il reste des places !
A comme Anaïs est à voir jusqu’au 29 mars 2015 !
Et dès le 14 avril 2015, toujours au Poche, découvrez Les Singulières.
Texte: Michael K.