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Andrzej Wierciński – façonner l’artiste

Dimanche 6 octobre, le Festival Chopin accueillera pour la troisième fois le pianiste Andrzej Wierciński, lauréat de nombreux prix internationalement reconnus. Pour le public de l’Hôtel des Bergues à Genève, il interprétera un programme très complet : des préludes de Chopin couplés à des préludes de Bach de mêmes tonalités, deux ballades, trois mazurkas et la Sonate en si bémol mineur. C’est par écrit qu’Andrzej Wierciński a répondu à quelques questions pour L’Agenda – en anglais dans le texte, d’une prose volubile vouée à son art.

Propos recueillis par Katia Meylan

Katia: Pouvez-vous nous raconter quel était votre rapport à Chopin en tant que tout jeune pianiste ?

Andrzej Wierciński : Je me souviens que j’aimais écouter ses œuvres. Les trois Polonaises de jeunesse du compositeur étaient spéciales pour moi. Non seulement j’ai pu les aborder à l’âge où Chopin les a composées, mais elles ont également eu beaucoup d’impact sur moi. Lorsque j’ai commencé à les jouer, j’ai ressenti un attachement et une compréhension de cette musique et des sentiments que Chopin voulait transmettre dans ces œuvres.

Quelque temps plus tard, lorsque j’ai eu neuf ans, j’ai entendu parler de Rafal Blechacz, qui avait remporté le Concours International Chopin en 2005. C’était un grand événement pour tout le pays en Pologne. Depuis l’époque de Krystian Zimerman, aucun Polonais ne s’était vu décerner le premier prix à ce concours. Pour le jeune artiste que j’étais, c’était une incroyable source d’inspiration, un désir de concourir moi-même un jour pour jouer de manière fantastique sur la scène de la Philharmonie de Varsovie. J’écoutais les chroniques du concours tous les soirs. Ça a été ma première grande rencontre avec le monde de Fryderyk Chopin.

Est-ce qu’avoir été lauréat du Concours National Chopin à 19 ans a fait évoluer votre rapport au compositeur ?

Chacun a son histoire et il n’y a de nombreuses manières de comprendre la musique de Chopin. Personnellement, je peux dire en toute confiance qu’il y a eu plusieurs tournants dans ma découverte de la musique de ce grand compositeur, et gagner le Concours National Chopin en 2015 est certainement l’un d’entre eux. Les prestations à la Philharmonie de Varsovie lors du Concours International Chopin en 2015 puis en 2021 en sont deux autres. J’ai été récompensé par un certain nombre de prix artistiques à travers le monde – premier prix au Concours de Saint-Priest en France, premier prix au Concours Neapolitan Masters en Italie, troisième prix au Concours Paderewski à Los Angeles et d’autres encore. Toutes ces récompenses façonnent l’image d’un artiste, mais dans mes périples solitaires le long de la route cabossée des abîmes musicaux, l’un des plus grands impacts s’est produit au moment où j’ai terminé mes études : tout en m’appuyant sur les ressources académiques et sur ce que j’avais appris de mes professeurs, j’ai pu alors découvrir la musique par moi-même.

Au fil des années, les mêmes phrases, les harmonies, les accords et les mélodies ont pris des formes différentes. Plus conscientes, plus rondes, et laissant un impact plus fort sur moi et sur le public.

Une personne mûrit au fil des ans et change de perspective ; alors bien sûr, mon point de vue sur la musique de Chopin a changé depuis que j’ai 19 ans. Plus jeune, même si je présentais ses œuvres en public, je n’étais pas conscient de toutes les notes ni de tous les détails que contenait la partition.

Pouvez-vous nous dire quelques mots au sujet du programme que vous jouerez le 6 octobre à Genève ?

C’est une combinaison très intéressante, qui m’a été suggérée par Aldona Budrewicz-Jacobson [ndlr, la directrice artistique du festival]. J’ai décidé de relever le défi. Chopin jouait très souvent les préludes de J.S. Bach comme « échauffement », il aimait la musique religieuse et il utilisait lui-même beaucoup de polyphonie dans ses compositions (comme la Sonate op. 58 par exemple). Les préludes comme début de tout et comme première partie d’un concert sont une manière fantastique d’introduire l’auditeur au récital.

Ensuite, deux ballades de Chopin font figure d’accent poétique et de référence aux ballades d’Adam Mickiewicz.

Les Mazurkas op. 59 dans la deuxième partie du récital font écho au berceau de la musique folklorique de Chopin. À la fin du récital, j’ai choisi l’une des compositions les plus dramatiques de Chopin, la Sonate en si bémol mineur, op. 35, qui fait référence à des ambiances sépulcrales et très tragiques. Chopin a d’abord composé la Marche funèbre seule en 1837, puis la sonate entière a été écrite et achevée en 1839, chaque mouvement ayant un caractère différent et distinct.

Andrzej Wierciński – Récital de piano
Dimanche 6 octobre à 17h
Salle des Nations – Hôtel des Bergues, Genève

Toutes le programme du Festival Chopin sur: www.societe-chopin.ch

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