Curieux mélange des genres que celui auquel l’on a pu assister mercredi dernier 30 octobre au Victoria Hall de Genève. L’affiche nous promettait, entre une ouverture de Haydn et une symphonie de Beethoven, des Quarks pour violoncelle et grand orchestre de Yann Robin.
Texte: Athéna Dubois-Pélerin
Sous l’élégante direction de Jonathan Nott, qui dirige ses musiciens sans même avoir besoin de s’encombrer d’une partition, l’OSR entame une pièce galante de Joseph Haydn. Très brève, juste le temps d’une mise en bouche. Arrive ensuite le plat de résistance, les fameux Quarks, qui se prépare tranquillement tandis que la salle bruit de murmures intrigués. Le violoncelliste soliste prend place sur une estrade légèrement surélevée, sa tignasse ébouriffée d’artiste bohème contrastant singulièrement avec la mise sobre du reste de l’orchestre: il s’agit d’Eric-Maria Couturier, musicien de renom ayant, chose rare, étroitement collaboré avec le compositeur de l’œuvre, à tel point que les Quarks lui sont dédiés personnellement.

À l’harmonieux classicisme de Haydn succède une pièce des plus étranges, qui ne comprend pas une seule note de musique. Ni le soliste, ni l’orchestre ne « jouent » de leurs instruments, du moins pas dans le sens traditionnel du terme. Les archets frottent les cordes pour en tirer des sons grinçants, stridents, qui tantôt s’étirent paresseusement, tantôt s’enchaînent de manière effrénée. L’œuvre, explique Yann Robin dans le programme, a été conçue comme une réflexion autour de la physique des particules et en particulier des fameux quarks, qui sont à ce jour les plus petites particules élémentaires de la matière ayant été découvertes. Tandis que les sonorités étranges et dissonantes s’égrènent dans la salle, nul n’a l’air de trop savoir que penser – et surtout que ressentir. Au moment de se lever à l’entracte, on croise ainsi beaucoup de regards éberlués et quelques sourires narquois. L’œuvre fait toutefois parler d’elle dans le foyer, preuve que la musique contemporaine a le mérite de délier les langues, si elle ne sait pas toujours toucher les cœurs.
Retour dans la salle pour la seconde partie de la soirée, dédiée à la quatrième symphonie de Beethoven. Les quatre mouvements courent sur une demi-heure qui paraît filer à toute allure, magistralement interprétés par l’OSR qui semble subitement s’enflammer. On ressort du Victoria Hall à la fois satisfait·e d’avoir eu l’occasion de se confronter à l’hermétisme de la musique de Robin (qu’on l’ait apprécié ou non) et, comme toujours, transporté par le génie intemporel de Beethoven.