#IphoneLegChallenge, #MoneyWirstChallenge ou encore le bikini bridge, voilà une liste non exhaustive des défis que se lancent certaines jeunes filles sur internet, via Facebook, Instagram ou d’autres réseaux sociaux. Le concept? Réaliser des photos prouvant notre maigreur, par exemple en faisant tenir un Iphone 6 sur ses deux genoux accolés, puis les poster sur le net. Aujourd’hui les femmes sont soumises plus que jamais à une pression de l’idéal féminin, poussant certaines jeunes filles à mettre en danger leur santé pour ressembler à leurs idoles photoshopées. Le Musée international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (MICR) s’est intéressé aux troubles alimentaires engendrés par ce diktat du corps parfait et en a fait une exposition qui ne laisse pas de marbre.
De plus en plus de jeunes filles se perdent dans l’anorexie, guidées par des modèles esthétiques qui remplissent leur page Instagram ou Facebook. Un trouble complexe qui touche de nombreuses familles, qu’on ne comprend pas toujours et qu’on a tendance à dénigrer. L’exposition Ados à corps perdu en parle sans prendre de pincettes, et on en ressort troublé. Troublé car on est totalement plongé dans l’univers des personnes atteintes par la maladie, on se croit parfois dans leur tête et on a envie d’en sortir. On comprend leur mal-être, leur douleur et leur peine à sortir de cette maladie.


L’exposition commence par une brève analyse de l’adolescence, période difficile, de transition, où l’on est perdu, où les responsabilités de l’âge adulte viennent mettre nos peluches dans le placard. Beaucoup de changements s’y passent, notamment l’apparition de courbes féminines, que certaines filles rêvent de voir disparaître. Cette introduction psychologique permet de comprendre pourquoi des troubles de l’alimentation surviennent en général à cette période de la vie, et pourquoi il est souvent difficile de s’en rendre compte pour l’entourage. Car entre crise d’adolescence et maladie, la limite est très fine.
En plus d’une interprétation psychologique de la maladie, on trouve une recherche anthropologique sur les représentations des femmes à travers les époques. De l’antiquité aux temps modernes en passant par le XIXe siècle, on voit l’évolution du corps féminin et des idéaux esthétiques. On se rend compte, tristement, que la femme du vingt-et-unième siècle se doit de rentrer dans des jeans taille 34 et de manger de la salade et des petites graines pour rester saine. Difficile de croire qu’il y a quelques années on adorait les hanches généreusement larges des pin-ups et leurs cuisses qui se touchaient largement.

Suite aux parties explicatives, on vit une véritable immersion dans la maladie, qui se caractérise en six phases. On débute avec un simple régime, puis on s’engouffre dans la spirale. Plusieurs installations permettent de traduire et de vulgariser l’origine du trouble et la part de responsabilités qu’a notre société sur l’anorexie. Elles peuvent être ludiques comme des miroirs déformants, ou oppressantes comme l’installation « Tu ne comprends pas », sorte de cabinet des horreurs qui nous plonge dans cette maladie psychique si difficile à expliquer. Des témoignages de patientes décrivant chaque phase de la maladie accompagnent la visite, du début à la fin, de l’entrée dans la maladie à sa guérison. Il faut le souligner, car il manque peut-être un message d’espoir disant que l’anorexie se soigne et que ses victimes peuvent s’en sortir, seul petit bémol que l’on aurait envie de donner à l’exposition. Le reste est un travail remarquable autant dans le contenu que dans la scénographie, qui permet de bien comprendre la maladie et pourquoi elle est de plus en plus rependue de nos jours.
Les dimanches pluvieux seront nombreux jusqu’au 8 janvier, ce qui vous donnera de nombreuses occasions d’aller découvrir cette exposition qui marque les esprits!
Texte: Joséphine Pittet
Plus d’informations sur http://www.redcrossmuseum.ch