Joué en ce moment au Centre Pluriculturel et social d’Ouchy, “Petits matins” de Matthias Urban affiche “complet” jusqu’à sa dernière représentation le 4 mars.
Texte: Katia Meylan
Pourquoi un tel engouement? Peut-être en partie car le public aime consommer local – ce qui plairait au personnage du fils végétalien. Le fils en question, c’est Matthias Urban, Lausannois, qui a également écrit et mis en scène la pièce. Ses acolytes de jeu et parents sur scène, Antonio Troilo et Anne-Catherine Savoy, sont eux-aussi des habitués des salles et écrans de nos régions. Une raison encore plus évidente du succès de la pièce est qu’avant d’être romands, ces comédiens-là sont excellents. Leur comportement et mimiques passent du terre-à-terre à l’absurde et les rires fusent tout au long de la pièce, pourtant un brin tragique.
Le fils se tient là, dans l’appartement presque vide de ses parents. Il ramasse la dernière chaise, éteint la lampe, et alors resurgissent entre ces murs les souvenirs du quotidien d’une famille. Matthias Urban traverse en accéléré les étapes presque toujours amères, plus rarement douces, d’une vie à deux. Dès l’emménagement, l’accommodation est difficile. “Tu m’aimes?” S’aiment-ils? Si le public n’en est pas sûr, eux non plus. Une passion kitsch chantée sur un piano improvisé, un mariage, un fils, il est déjà grand il ne vit plus à la maison. On ne sait pas quoi se dire à table à Noël, surtout avec ce fils qui a tout à coup décidé de ne plus manger de viande alors qu’on s’est donné tant de peine exprès pour lui.
Étrangement, l’absurde vient renforcer la banalité du quotidien. Les rires forcés, les sacs en papier minuscules que l’on porte à deux avec peine, le lit Ikea que l’on fait entrer sans problème… Ces moments absurdes, c’est aussi Bégonia, la mère, qui a l’option “bruitage” inclue. C’est John, le père, qui nous sort de la diégèse pour noter qu’elle a oublié de faire le bruit de la purée servie dans l’assiette.Cela dépendra de son sens de l’humour ou de sa sensibilité, mais devant cette pièce on se retrouve toujours entre le rire et la gêne un peu triste, à être témoins des disputes futiles et des travers de ces personnages, que l’on reconnait chez les autres, que l’on nierait en bloc posséder soi-même, qui pourraient être ceux de tout un chacun.