Le Mapping Festival, qui se déroule à Genève du 18 au 28 mai 2023, fête cette année sa 19e édition. Faisant la part belle aux mondes de l’audio, du visuel et de l’électronique et ses déviantes, le festival retrace les liens que nous entretenons tou·te·s (ou presque) avec la technologie en nous invitant à aller regarder au-delà de ce qui nous est donné à voir habituellement. On trouvera différentes animations telles que des tables-rondes, des workshops, des performances et des soirées. Dans une ambiance festive et décontractée, les professionnel·le·s et amateur·ice·s des technologies de l’information et de la communication (TIC) ainsi que des artistes se retrouvent pour explorer et partager leurs connaissances et leurs visions de ces domaines.
Texte par Allan Kevin Bruni et Steve Weisshaupt
Photo de couverture: Recombination, de Julius Horsthuis
Art, technologie et information
Rythmé dans toute sa longueur par l’exposition Art, technologie et information , curatée par Sarah Ducret et Boris Edelstein, le Mapping rassemble des artistes locaux·les et internationaux·les, nous aidant à interroger notre relation à la technologie et à l’information. C’est notamment par des œuvres créées par les étudiant·e·s en Media & Interaction Design de l’École cantonale d’art de Lausanne (ECAL) qu’un projet nommé Fantastic Smartphones dénonce l’utilisation abusive, chronophage et égocentrée que nous faisons de ces objets omniprésents dans nos vies. Au travers d’une utilisation dérivée des applications de rencontres ou des innombrables traceurs de mouvements de nos corps, de notre sommeil et même de notre rythme cardiaque, ces installations nous rendent attentif·ve·s à l’autorisation tacite que nous leur donnons de monitorer nos vies et de transmettre nos informations personnelles.
Biobots de Aurélien Pellegrini, Bastien Claessens et Evan Kelly – ECAL. © pecorini.net
Nous avons été, aussi, tout particulièrement interpellés par l’interactivité de Don’t Answer Be Happy par laquelle Simon Müller et Jonas Wolter – accompagnés de Saïd Boulahcen pour le sound design – remettent en question l’ambivalence de la réalité numérique en nous confrontant à une Intelligence Artificielle qui sollicite notre moralité et nous met face à des questions auxquelles les réponses ne peuvent être que oui ou non. Ces questions nous obligent à prendre conscience des déboires, voire du malheur, qui pèsent sur les populations moins privilégiées qui sont à la merci et au service de notre consommation technologique occidentale. On soulignera notamment la révélation de faits tels que le néo-esclavagisme exercé par les GAFAM.

Dont Answer Be Happy de Simon Müller, Jonas Wolter et Saïd Boulahcen. © pecornir.net
Workshops
Parmi les trois workshops proposés pendant la durée du festival, nous avons eu la chance de participer à Les radioamateurs: intro, explication, démo animé par Mathias Coinchon (CH), ingénieur EPFL et passionné des ondes radios. Une opportunité unique pour tout un chacun d’avoir pu découvrir l’envers, mais surtout l’origine, de ce qui nous permet aujourd’hui de communiquer instantanément avec les quatre coins du globe. Nous avons pu retracer, par exemple, l’utilisation des ondes radio à travers l’histoire dans une dimension technique, mais aussi expérimentale: Mathias, par l’utilisation d’une échelle faisant office d’antenne, elle-même connectée à un émetteur, a réussi à envoyer un signal radio en Russie, à Hong-Kong et en Turquie, inter alia.
Tables-rondes
D’entre les trois tables-rondes présentes au programme du festival, nous nous sommes rendus à Plateformes d’information, journalisme et post-vérité qui a remis en perspective les plateformes d’information ainsi que le(s) rôle(s) du journaliste dans une société hyper connectée et condamnante. Cette discussion a soulevé un vif débat sur la réelle signification de l’application de la démocratie à l’intérieur même de cette discipline. En abordant des postures telles que celles des lanceurs d’alerte, du citoyen curieux et engagé (concept amené par Antoine André) et du journaliste (posture représentée par Olivier Tesquet, Joseph Farrel et Juan Passarelli), nous avons pu voir débattre plusieurs professionnels de la branche. Ils ont ainsi élevé les questionnements à un niveau qui nous touche tou·te·s dans notre ère de plus en plus confrontée aux nouvelles technologies mais également à la réprimande quand il s’agit de la divulgation d’informations jugées sensibles par un gouvernement donné. Le désormais célèbre cas de Julian Assange a été utilisé pour exemplifier les répercussions et les débordements que peuvent subir certains acteur·rice·s lors de la récolte et la diffusion d’informations brutes.
Petit plus! Les tables-rondes sont couronnées par des rencontres entre intervenant·e·s et public au Cryptobar, réel espace d’échange et de discussion, où il est même possible de prendre un petit verre.
Continuant son déroulement à l’espace Le Commun, le festival se poursuit dans le Jardin des Nations et est à découvrir jusqu’au 28 mai. Diverses associations telles que La Barje côtoieront notamment l’installation de Syllepse, dispositif ultra-technologique, qui offrira aux visiteur·euse·s des concerts, des mappings low-tech et des expériences immersives.
Mapping Festival
Du 18 au 28 mai 2023
Le Commun,
Jardins des Nations, Syllepse,
Scène de la Barje,
Genève