Musique actuelle

Emma Ruth Rundle

Emma Ruth Rundle: de la Dark Folk à Antigel

Emma Ruth Rundle était à Genève le 14 février dernier dans le cadre du festival Antigel pour la promotion de son album Engine of Hell. Ce dernier album, épuré et dépouillé des textures de guitare et de l’urgence vocale qui ont fait la notoriété de l’artiste, marque une étape dans sa carrière et les émotions brutes qui résonnaient dans les murs du Casino Théâtre ce soir-là étaient chargées d’une intensité qui n’avait rien à envier au plus bruyant des groupes de rock. 

Texte d’Eloïse Vibert

La soirée a commencé avec les textures sonores anxiogènes de Jo Quail, des pièces inspirées par les énergies de la nature dont la dissonance portée par un violoncelle électrique squelettique capturait le souffle de l’auditoire. Cette première partie de soirée nous emmenait dans des paysages tantôt arides, tantôt inondés, parfois urbains où la nature avait repris ses droits et où nos peurs primaires ne pouvaient que fluctuer au rythme des loops superbement maitrisés.

Puis, après une pause d’une dizaine de minutes ponctuée par quelques mots du directeur d’Antigel, c’est au tour d’Emma Ruth Rundle de monter sur scène. Habillée d’une combinaison et d’une veste dont la moitié est noire et l’autre moitié blanche, maquillée avec des larmes pailletées, la compositrice s’assoit au piano et brise le silence: “Bonjour, mon nom est Emma et je vais vous jouer l’album Engine of Hell du début jusqu’à la fin”.

La sobriété de cette première intervention est suivie par les premières notes de Return, le premier morceau de l’album. La tension toujours palpable de la performance précédente se transforme soudainement en une mélancolie de plus en plus intense, une douleur enfermée dans un écrin d’abandon.

Les morceaux se suivent devant une audience silencieuse, soucieuse de ne pas casser la beauté de cette douleur exquise. Bloom of Oblivion nous emmène au plus profond des étapes du deuil – un thème récurrent de cette soirée – ponctué par des chuchotements, et clôturé par des cris du cœur répétant comme une libération: “I love you, see ?”.

Puis, la compositrice nous invite à vivre le souvenir capturé dans la chanson Dancing man. Citadel suit peu de temps après, accompagné par Jo Quail au violoncelle, nous offrant ainsi une respiration en mêlant l’énergie complémentaire des deux artistes.

L’interprétation d’Emma se veut théâtrale mais avec mesure et sobriété, rappelant un peu le jeu de scène de Tori Amos, où les jeux de regard servent le texte et les émotions brutes partagées dans ce moment suspendu dans le temps. L’artiste laisse parfois échapper quelques larmes, nous donnant un accès privilégié à une authenticité salvatrice.

Enfin, arrive le dernier morceau du set: In my Afterlife, qui donne le coup de grâce avec une progression d’accords qui nous emmène vers la fin de la performance en beauté. La chanson est suivie d’un rappel par lequel l’artiste clôture le concert avec des morceaux de ses albums précédent dont Marked for Death, issu de l’album du même nom.

Et puis, comme une apparition, Emma remercie le public, se lève, un peu déboussolée et disparait d’un côté de la scène nous laissant avec les tornades d’émotions qu’elle a suscité.

L’ironie de la date à laquelle ce concert a eu lieu n’échappera pas à certain. Malgré l’association un peu malheureuse en apparence entre un concert qui expie la douleur et le deuil de l’artiste et la fête des amoureux, l’authenticité de la performance et la catharsis qu’elle renfermait était un cadeau qui dépasse largement un bouquet de roses offert hors saison.

https://antigel.ch/fr 

Melissa Kassab

Les Créatives – Douceur et puissance à La Gravière

Hier, la première soirée du festival Les Créatives en collaboration avec La Gravière a eu lieu. La Genevoise Melissa Kassab et la Londonienne Gretel Hänlyn ont joué de leur guitare pour le plus grand plaisir du public. Une soirée aux sonorités contrastées qui nous a transportées dans deux univers bien propres à chacune.

Texte de Catherine Rohrbach

Il est 20h30, sur la scène de La Gravière, la chanteuse Melissa Kassab arrive avec sa guitare, son seul accompagnement. Avec sa voix et ses arpèges, elle nous transporte dans son univers. Un univers doux, bienveillant et attachant où seuls deux accords suffisent pour faire une belle chanson. Si on décèle une certaine timidité, qui est peut-être dûe au fait qu’elle joue à la maison, il n’y a aucun doute qu’elle appartient bien à la scène. Elle est naturelle et authentique, tout autant que son folk. Ses textes, ses quelques reprises (c’est plus facile d’être soi-même quand on chante quelqu’un d’autre, dit-elle) et ses anecdotes nous donne un aperçu de qui elle est, sans masque.

En deuxième partie de soirée, c’est Gretel Hänlyn qu’on découvre. Accompagnée de son groupe, celle-ci nous emmène dans un tout autre monde. Hänlyn, qui jouait en Suisse pour la première fois, pourrait sans problème prétendre appartenir à la scène grunge et alternative du Seatle des années 90 et pourtant, elle est anglaise et n’était pas encore née quand Kurt Cobain nous quittait. Ses notes sont brutes, sa voix est profonde, le tout est d’une puissance qui se marie bien avec la scène de la Gravière.

Gretel Hänlyn

Tout comme avec Kassab, la performance de Gretel Hänlyn est bien à l’image de sa personnalité. Sombre et gothique aux premiers abords, une certaine légèreté se laisse entrevoir au fil des chansons, avec notamment un nouveau titre, une ode à son chat, qui prend des sonorités pop punk.

À la fin des concerts, la présence de Melissa Kassab et Gretel Hänlyn sur une même affiche semble logique. La douceur de Kassab et la puissance de Hänlyn ont en commun leur authenticité. Elles n’ont pas peur d’être elles-même sur scène. Il n’y avait pas de prétention et aucun faux semblant à la Gravière hier soir.

Le festival continue!

Kendrick Lamar

Kendrick Lamar, une légende à Lausanne

Mercredi 26 octobre, La Vaudoise Arena accueillait le très attendu concert de Kendrick Lamar. Tant par sa performance que son talent, le lauréat du prix Pullitzer 2018 n’a pas déçu ses fans.

Texte de Catherine Rohrbach

Le public est en effervescence. Un grand rideau blanc tombe sur la scène. Dans quelques minutes, un des rappeurs les plus influent de cette génération commencera sa performance. L’intro de United In Grief résonne dans l’Arena, des danseur·euse·s entrent sur scène par une passerelle qui divise le public en deux, le rideau se lève et révèle Kendrick Lamar au piano accompagné d’une marionnette à son image. Le show commence.

La formule est simple, Kendrick avec son flow percutant et infatigable, quelque figurant·e·s, une scénographie sobre mais saisissante, une interprétation de son dernier album Mr Morales & The Big Stepper entrecoupée de ses plus grands succès. Le rappeur arrive facilement à enflammer la fosse, à lever le public assis et à mettre le feu sur scène (littéralement).

Si le concert suit assez bien la tracklist de Mr Morales and the Big Steppers, Kendrick Lamar arrive sans aucune peine à insérer les chansons de ses précédents albums tout en gardant le fil narratif du dernier venu. Le public reste captivé du début à la fin. Même les featuring avec les premières partie Tanna Leone et Baby Keem gardent la cohésion de la performance. Musicalement, il n’y a rien à redire. On regrette peut-être l’absence de musicien·ne·s sur scène qui sont rélégué·e·s sur les côtés, comme lors de sa dernière tournée en 2018.

Kendrick Lamar2

Comme dans une pièce de théâtre, le rideau sur scène se lève et se baisse pour marquer les changements d’actes. La performance du génie de Compton se fait, en effet, sur plusieurs tableaux, chacun séparé par des interludes narrés par Dame Helen Mirren et encré dans l’actualité. En effet, s’il est facile de s’évader sur les sons de Lamar le temps de son concert, ce dernier reste fidèle à lui-même et ne nous fait pas oublier la réalité sociale dans laquelle il évolue. Ainsi, on le voit en ombre chinoise avec des flèches dans le dos pendant Count me Out, comme pour montrer les traumas de sa génération, ou encore dans une boite en plexi faisant référence à la pandémie actuelle: “it’s time to take your covid test”, entend-on avant Alright. Tout ira bien, nous assure l’artiste et on veut le croire. Cette boite pourrait également faire référence aux règles du hip hop que Kendrick fait et défait avec chacun de ses albums. En s’élevant dans celle-ci plusieurs mètres au-dessus de la scène, l’artiste montre qu’il est au-dessus de tout dictat. La dernière citation du concert est d’ailleurs “you’ve made it out of the box. Now, can you stay out of it?”. Avec cette performance magistrale Lamar montre bien qu’il ne doit pas être casé dans une boite.

Le concert se termine comme il a commencé avec Kendrick Lamar seul. Sur son piano. Sur les notes de Savior le rappeur quitte la scène humblement. La fin abrupte de la performance en rajoute à sa puissance. La vaudoise Arena se vide de son public fier d’avoir assisté au show d’un géant du rap contemporain.

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Tourne-Films Festival

Tourne-Films Festival: le petit qui devient grand

Créé par des jeunes lausannois∙es d’origine et d’adoption, le Tourne-Films Festival Lausanne revient pour une 4e année. Après la comédie musicale, le band movie et Ennio Morricone, c’est le biopic qui sera au centre de cette édition. Entre concerts et projections, tout en passant par un programme de médiation et une compétition officielle, le TFFL se prépare à monter d’un cran et prendre un nouveau statut.

Texte de Simon Coderey

Depuis maintenant quatre ans, le cinéma et la musique possèdent une nouvelle maison pour cohabiter. Après une première année à Malley, c’est à la villa de Mon Repos que le festival a pris ses quartiers. Toujours début septembre, le TFFL vient clôturer en beauté une saison estivale soutenue dans la capitale vaudoise. Après une édition réussie en 2021, et ceci malgré les restrictions sanitaires, le TFFL revient grandi et mature. Il a repensé le terrain et a doublé son espace en prenant l’entièreté du pourtour de la villa de Mon Repos. La musique et le cinéma, bien que frères et sœurs au TFFL, font maintenant chambre à part. Du côté des gradins naturels, la musique viendra commencer les festivités tous les soirs. Joueront des musicien∙ne∙s de la région, avec notamment les Lausannois Crux Sledge ou la productrice, compositrice et interprète d’électronica La Colère. La française Wendy Martinez, avec sa pop rétro, fera écho à Barbara, dont le biopic de Mathieu Amalric sera projeté en seconde partie de la soirée du vendredi. Puis du côté de la villa, l’équipe du festival a décidé de collaborer avec RoadMovie, un cinéma itinérant qui fait vivre le 7e art depuis des années en Suisse romande.
Tourne-Films Festival

Photos: Audrey Manfredi

La programmation de films se focalise donc sur le biopic avec un twist. Les deux co-présidents expliquent que le TFFL propose des long-métrages “sortant des sentiers battus et jouant aux niveaux formel ou narratif avec les limites du genre du film biographique”. Cette rétrospective commencera le mercredi à la salle Paderewski du Casino de Montbenon avec le I’m not there de Todd Haynes qui retrace la vie d’un artiste, très semblable à Bob Dylan, interprété par six acteurs et une actrice. Ce sera ensuite à Mon Repos que la programmation se poursuivra avec le Barbara de et avec Mathieu Amalric mettant en scène une réalisation d’un biopic sur la chanteuse. Les limites entre raconter la vie d’un∙e artiste et la créer de toute pièce seront questionnées avec le film Eden racontant l’histoire d’un DJ fictif dans le contexte bien réel de la french touch. Puis deux grands noms de la musique seront également mis avec avant avec l’interprétation de Ray Charles par Jamie Foxx ou encore le The Doors d’Oliver Stone. Des films de patrimoine à voir ou à revoir.

En parallèle, une double compétition officielle vous fera découvrir des court-métrages musicaux et internationaux ainsi qu’une sélection de clips 100% suisses montrant la volonté du TFFL de promouvoir cette forme créative si connue et pourtant oubliée des événements cinématographiques. Le jeudi et le vendredi vous pourrez ainsi découvrir ces œuvres sur grand écran et voter pour votre coup de cœur via le prix du public. 

Le Tourne-Films Festival ce sont aussi des ateliers pour les plus jeunes et des conférences le samedi et le dimanche. Pour les plus grand∙e∙s, les soirées du jeudi, vendredi et samedi se poursuivront à la Cave du Bleu Lézard pour des afters qui vous feront danser jusqu’au bout de la nuit.

Tourne-Films Festival

Photos: Audrey Manfredi

Au-delà de la soirée d’ouverture payante, le TFFL est gratuit et ouvert à tous∙tes. Que vous soyez mélomanes, cinéphiles ou avides de découvertes, n’hésitez pas, le Tourne-Films Festival est là pour vous. Un petit avant-goût? Le TFFL organise ce vendredi 26 août, en collaboration du bar éphémère La Bourgette à Vidy, une soirée avec DJ et la projection de Love and Mercy, un biopic sur Brian Wilson des Beach Boys et réalisé par Bill Pohlad.

Le Tourne-Films Festival recherchent encore des bénévoles pour la réussite de son édition.

Pour plus d’informations et programmation complète: www.tffl.ch

Tourne-Films Festival
Du 7 au 11 septembre 2022
Cinémathèque, Parc de Mon Repos et Cave du Bleu Lézard, Lausanne

Venoge festival

Venoge Festival: un retour gagnant

Après deux ans d’absence due à la pandémie, le Venoge Festival revient pour une année haute en couleur et en musique. Durant cinq jours, les champs de Penthaz vont vibrer au son de têtes d’affiche internationales allant du rock à l’électro réjouissant tous les publics.

Texte de Simon Coderey

L’été 2022 aura été synonyme de retrouvailles pour les mélomanes de la région. Montreux Jazz, Paléo, Caribana, les grands noms ont fait danser et pleurer leur public depuis quelques semaines. Parmis ces événements musicaux rythmant nos périodes estivales, des festivals plus petits montrent à quel point l’Arc lémanique est riche pour la musique. Plus petit ne veut pas forcément dire rougir face aux monstres que sont les grands frères nyonnais et montreusiens. Bien au contraire.

Depuis 26 ans, le Venoge Festival a su se faire une place parmi les grands avec une programmation éclectique et actuelle. Iggy Pop, Julien Clerc, Vitaa & Slimane, Kool & the Gang. Les organisateur∙rice∙s ont bénéficié de la confiance de beaucoup d’artistes qui étaient prévu∙e∙s en 2020 et dont les concerts avaient dû être annulés. Mais c’est aussi cette période d’effervescence qui sourit au Venoge. Les musicien∙ne∙s sont là et ont soif de jouer. Il y a évidemment eu des annulations, dont le groupe phare de la scène néo-métal du début des années 2000 Limp Bizkit qui a renoncé à sa tournée européenne pour des raisons médicales. Mais le directeur Greg Fischer et son équipe ont réussi à relever les défis et, malgré quelques regrets, la programmation est belle et saura plaire à toutes les générations.

De plus, le festival fait la part belle à la scène musicale romande et vaudoise avec une scène 100 (99)% suisse, offrant ainsi une plateforme à ces musiciens et musiciennes qui prouvent d’année en année que la musique a de très beaux jours devant elle dans nos contrées. Parfait pour revoir, si nous devions citer qu’un nom, Baron.e, samedi soir. Eux qui avaient déjà pris au pied levé un créneau à Paléo en juillet.

C’est un Venoge plus mature, qui a grandi après la pandémie que nous (re)découvrons. Un nouveau lieu quatre fois plus grand et prêt à accueillir jusqu’à 9000 personnes par soir. Mais son côté festif et amical prend une place plus importante dans le cœur des organisateur∙rice∙s. La capacité est pensée pour que chacun∙e puisse avoir accès à la grande scène. Même les soirs sold-out, personne ne se sentira comme une sardine à l’instar d’autres festivals de la région qui font la course aux records. Ces défis logistiques ont été pris à bras le corps et tout est prévu pour que la fête soit belle: des transports publics en direction de Lausanne et Yverdon partant à toutes heures de la nuit, un concept de “bienveillance” afin de maximiser la sécurité des spectateur∙ice∙s, une app spécifique pour le festival et une reconduction du système Cashless. Tout a été pensé pour faciliter la vie des festivalier∙ère∙s.

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Iggy Pop. Photo: Bjorn Tagemose

Hier soir, L’Agenda est allé découvrir cette manifestation qui a su grandir tout en restant à taille humaine. Il y a quelques jours, un rédacteur en chef avait écrit dans un grand journal vaudois que les girons campagnards aidaient à la cohésion du canton. Nous pouvons affirmer aujourd’hui que le Venoge Festival a le même rôle. Il suffit de faire le tour du terrain pour comprendre que les bénévoles sont des locaux qui ont l’envie de faire vivre leur région. Plus qu’un événement majeur, c’est une fête populaire qui vient clôturer un été chaud et intensif.

L’attente a été longue avant de voir l’événement de cette première soirée: Iggy Pop. Le chanteur américain a su montrer qu’il était encore dans une jeunesse éternelle lors de son concert. Folie, énergie, sueur, la recette est toujours là et elle fonctionne si bien. Même son perfecto n’aura pas tenu plus d’une chanson et nous avons pu retrouver la marque de fabrique de l’Américain: être torse nu. Quelle entrée en matière pour une édition qui s’annonce belle.

Le Venoge Festival est une réussite en tous points. Et l’engouement du public est au rendez-vous. Le dimanche est déjà sold-out et le vendredi ne serait tarder. Ils restent cependant des billets pour le jeudi et le samedi. Alors n’hésitez pas si vous voulez fêter la fin de l’été avec brio et entourer d’une équipe bénévole au petit soin de tous∙tes.

Plus d’informations: www.venogefestival.ch

TL

Une Fête de la Musique, ça commence comme…

…Éplucher le programme et être aux rendez-vous du jazz, du rap, du classique ou des cornemuses; Proposer un afterwork à ses collègues et, depuis une terrasse, confier aux concerts successifs le soin d’accompagner ses discussions; Traverser la ville d’un bon pas, réaliser que l’on est le 21 juin et devoir à regret passer son chemin – ou au contraire, pouvoir se laisser happer par une scène que la nuit dernière a érigé là et qui n’y sera plus demain; Faire confiance à ses pas pour tomber sur une nouvelle découverte.

Texte de Katia Meylan

Texte de Katia Meylan

Hier soir, c’est à Lausanne que L’Agenda a vécu sa Fête de la Musique. Impossible de tout voir! La soirée nous a mené du pop-rock au swing d’un big band, pour finir dans la fraîcheur d’une salle du conservatoire devant un chœur amateur de jeunes femmes. Car la beauté de la Fête passe aussi par ce mélange d’expériences et de générations qui fêtent la Musique sous toutes ses formes.

Don’t Kill Duncan – Le Barberousse – 18h30

Entre deux bâtiments du Flon, depuis la terrasse du Barberousse, trois multi-instrumentistes donnent de la voix. Notre chemin croise à nouveau Boris Degex, Coralie Vollichard et Paul Berrocal. En effet, il y a quelques temps, nous les avions découverts au Théâtre le Reflet de Vevey dans une pièce intitulée Band(e) à part, dans laquelle les compères interprétaient trois membres d’un groupe célèbre en tournée, suivi par des caméras de journalistes pour un reportage. C’est là que nous avions entendu pour la première fois quelques titres de leur groupe Don’t Kill Duncan. Le trio, à la fois comédien, improvisateur et musicien, peut donc investir à la fois un théâtre aussi bien qu’une scène de concert! Hier, cette triple casquette se ressentait surtout dans le corps et l’expression que mettait la chanteuse et bassiste à son interprétation.

Oh, et pour celles et ceux qui se demanderaient d’où vient le nom du groupe: c’est une référence à Macbeth, en prenant le contrepied de la sorcière shakespearienne qui soufflait que pour devenir roi, il fallait tuer Duncan…

Don't kill Duncan

Big Band Transport Lausanne Music – Place de la Palud – 20h

Les TL ont un Big Band, et ils assurent! Impossible de ne pas s’arrêter devant leur scène de la Place de la Palud, où ils faisaient danser parents et enfants, avaient captivé des maîtres et leurs chiens en balade et faisaient tourner toutes les têtes du restaurant Le Raisin à côté. Surtout lorsque la guitariste Ewa Kuzniak-Scherer a pris le micro pour une interprétation de Fever, ou que le saxophoniste Clency Court a enchaîné avec Feeling Good. Multi-talents, avec ça…
Dirigés par Simon Lamothe, des standards qui faisaient du bien!

Chœur à Corps – HEMU et Conservatoire – 21h

Nous avons finalement rejoint le conservatoire. Y aurait-il du public à cette représentation alors que la météo incitait tant à passer la soirée à papillonner de scène open-air en scène open-air? Oui! La petite salle Utopia a rassemblé un public qui a apprécié la fraîcheur des voix des membres de l’ensemble vocal féminin Chœur à Corps, sous la direction artistique de Claire Benhamou. Les jeunes femmes ont interprété en chant et en danse des extrait de leur spectacle original Il est où le bonheur?, composé de titres tirés de comédies musicales et autres chansons pop.
En ressortait de beaux accords, tant harmoniques qu’entre les jeunes amatrices dont le plaisir d’être là était communicatif.

Choeur à corps

**

Et sur toute la ville les nuages se sont tenus tranquilles, donnant le temps aux groupes le temps de jouer sereinement lors de cette première soirée d’été, transition entre la canicule de ces derniers jours et la pluie de la nuit.

fetemusiquelausanne.ch

PSO Nicolás Duna

Vers l’infini et au-delà – Musique (pas si) classique

Il n’y a pas (si) longtemps, dans une galaxie proche, très proche, un drôle de vaisseau errait dans l’espace. À son bord, quelques voyageur∙euses intrépides prêt∙e∙s à braver le vide intersidéral pour quelques notes de musique. Dans l’espace, si personne ne les a entendu crier, les applaudissements eux ont dû réveiller quelques martiens…

Texte de Mélissa Quinodoz

Le vendredi 22 avril 2022, le Philharmonic Show Orchestra prenait son envol pour la première fois. Depuis la piste de lancement genevoise du Victoria Hall, les passager·ère·s étaient donc nombreux·ses à vouloir prendre place à bord du vaisseau mère pour ce voyage inaugural. Il faut dire que la feuille de route était des plus attractives. Au programme, des œuvres classiques bien sûr, et notamment les incontournables Planètes de Holst, mais également des morceaux issus de la pop-culture, E.T, Interstellar et Star Wars. Un mélange de saveurs assumé par le Philharmonic Show Orchestra qui souhaite proposer à son public une nouvelle définition du concert, celle de “spectacle symphonique”! Avec pour objectif la transversalité, il s’est ainsi fixé comme mission d’offrir un espace de rencontre et de réflexion pour les acteurs culturels de tous bords.

PSO2 Photo de Nicolás Duma

Photo: Nicolás Duma

Confortablement installé·e·s dans leurs sièges, les tablettes relevées et accueilli∙e∙s par une charmante hôtesse de l’air, les passager∙ère∙s sont donc parti∙e∙s vers de nouveaux horizons musicaux. Un vol des plus réussi, grâce notamment au commandant de bord Pierre-Antoine Marçais (ou PAM pour les intimes), qui a su éviter toute forme de turbulence. Si la première partie était des plus agréables, c’est après une courte escale que la magie a véritablement opéré. Dans la pénombre du cockpit, quelques passager·ère·s se sont alors levé·e·s pour entonner la magnifique chanson Stars du Letton Eriks Esenvalds. Un pur moment d’apesanteur qui a mis en lumière les voix quasi extraterrestres de certain·e·s voyageur·euse·s!

En descendant de l’appareil, on ne pouvait que souhaiter y remonter prochainement pour un nouveau périple d’une ou deux années lumières. Le sourire des passager·ère·s en disait d’ailleurs long sur la réussite de ce premier envol. Le Philharmonic Show Orechestra est définitivement un orchestre du 21e siècle (voire même du 22e siècle) prêt à relever les défis et les enjeux culturels d’aujourd’hui et de demain. C’est avec impatience qu’on attend les prochains épisodes de cette nouvelle série musicale!

Toutes les informations et les prochaines dates du Philharmonic Show Orchestra sont à découvrir ici:

philharmonicshoworchestra.com/#pso

Vous pouvez également les suivre et les soutenir sur les réseaux sociaux:

Instagram @Philharmonic_Show_Orchestra

Facebook @PhilharmonicShowOrchestra

Nicolás Duma

Photos: Nicolás Duma

Je Suis Grecque

Chanter la liberté

En incarnant Melina Mercouri dans son nouveau spectacle musical, Nathalie Pfeiffer nous invite à savourer bien plus qu’un parfum de légèreté sur les rives du Léman. Je suis Grecque nous emmène au tournant d’une carrière sacrifiée afin de porter la voix d’un peuple réduit au silence.

Texte et propos recueillis par Coralie Hornung

Le 21 avril 1967, l’armée prend le pouvoir en Grèce alors que la chanteuse et actrice Melina Mercouri, reconnue internationalement comme meilleure actrice pour le film Never on Sunday au Festival de Cannes de 1960, continue à susciter un engouement pour la Grèce et domine la scène de Broadway. Melina fait face à un dilemme cornélien: poursuivre sa brillante carrière internationale ou profiter de la visibilité que lui offre sa notoriété afin de porter la voix de son pays réduite au silence par l’armée. C’est sur ce dilemme que s’ouvrira la pièce mise en scène par Jean Chollet et interprétée par Nathalie Pfeiffer, Christophe Gorlier et Raphaël Tschudi.

Pour Nathalie Pfeiffer qui porte le projet, la genèse de la pièce remonte au 33 tours qui tourne en boucle dans la maison de son enfance à la Tour-de-Peilz et fait résonner le cri du cœur de Melina Mercouri contre les colonels, à des kilomètres du conflit. D’abord touchée par la voix et l’énergie qui se dégage de cette musique, Nathalie connaîtra rapidement par cœur les chansons de Melina. Elle comprendra ensuite la puissance et la profondeur de ce qu’elle exprime en écoutant les récits d’une proche amie de sa mère, épouse du réalisateur grec Robert Manthoulis. C’est donc naturellement que Nathalie Pfeiffer choisira de porter un projet sur Melina Mercouri, à l’occasion du centenaire de la naissance de cette dernière.

En mars 2020, alors que la Suisse est confinée et que le monde de la culture semble être mis sur pause, on s’affaire dans le studio SUBA CFS sous la direction du percussionniste Robin Vassy qui crée les arrangements musicaux à l’oreille en écoutant les chansons de Melina. Chaque instrument sera enregistré individuellement avant d’être mixé pour que Nathalie Pfeiffer puisse finalement poser sa voix, dans le respect des arrangements musicaux originaux de 1970 et des contraintes sanitaires de 2020. Le résultat est époustouflant et deux extraits sont disponibles sur le site de la Compagnie Paradoxe. Le spectacle donne une importance toute particulière aux chansons qui sont un cri de guerre plutôt qu’une mélodie d’accompagnement. L’auteur et metteur en scène Jean Chollet nous offre bien plus qu’une rétrospective nostalgique et mélodieuse de la carrière de Melina Mercouri. Spectateurs et spectatrices sont invité∙e∙s à découvrir la puissance et l’allégresse avec laquelle une femme brise le silence imposé à son peuple et sacrifie sa carrière pour chanter la liberté.

Scylla – Quand le rap écrit des chansons d’amour

Je me rends aux Docks à Lausanne, à quelques minutes de chez moi, comme si je me rendais en terre inconnue. Mais pas seule, j’ai des guides qui connaissent les codes de ce monde. La salle est bondée, on est arrivé juste à l’heure, à peine entrée et les basses me font vibrer des chevilles aux cheveux. Est-ce que ce sera la seule chose qui me fera vibrer? je me demande.

Texte: Katia Meylan

 “Ça va Lausanne? On l’attend depuis longtemps, ce concert!”. À la voix puissante qui sourit, le public, malgré les masques, répond enflammé sous la pluie. Il a envie de rendre au rappeur ce que celui-ci lui a donné, dans ses singles, depuis la sortie de ses deux derniers albums en 2019. Deux ans que le public suisse attendait ce concert de Scylla.

Depuis le fond de la salle je le vois, veste rembourrée, entouré de trois artistes qui gèrent le son et les voix de backup, parapluies à la main. Derrière moi, mon guide. À gauche, un fan qui connait les textes et à droite, deux potes qui de temps en temps se disent “quelle voix de ouf”. L’ambiance me surprend, à la fois calme et grondante. L’insurrection est palpable mais pas si visible car chacun∙e écoute. Juste devant moi, un gars immense, il fait un cœur avec ses mains, il s’exprime, il connait les textes lui aussi. Moi pas encore. En concert, généralement j’aime bien danser… mais là, puisque je ne connais pas, je décide de déléguer mes mouvements à ce grand gars. Il ne le sait pas mais je disparais derrière lui, je reste immobile à découvrir les textes.

L’ogre de Bruxelles, le poète, de sa plume a gratté la couche de vernis de nos vies.

Bougies, féérie et lointaines galaxies: on a testé un concert Candlelight de Fever

Peut-être avez-vous eu vent de cette nouveauté fraîchement arrivée à Genève: les concerts éclairés à la bougie, qui promettent au public une ambiance mystique et enchanteresse. Avec des représentations prévues au Théâtre Les Salons, au Victoria Hall, à l’hôtel Four Seasons et même au sommet du Salève (si, si) la start-up américaine Fever, toujours à l’affût de «bons plans», fait les yeux doux au public genevois et espère le conquérir à la lueur romantique des chandelles. Pari réussi?

Texte: Athéna Dubois-Pèlerin

Parmi la palette de spectacles à l’affiche, aux programmations joyeusement hétéroclites, il a fallu faire un choix après avoir considéré les différentes soirées annoncées, célébrant Chopin, Enio Morricone, Daft Punk ou la musique traditionnelle espagnole. C’est peut-être là la première chose qui interpelle et amuse lorsqu’on découvre Candlelight: une envie presque candide de proposer des saveurs pour tous les goûts, doublée d’une bonne volonté à toute épreuve. On y trouve du Hans Zimmer comme du Vivaldi, les soirées spéciales « musiques d’animes japonais » s’affichent de manière décomplexée à côté des Quatuors Beethoven. Rafraîchissant. 

On s’embarque donc pour un concert « John Williams » au Théâtre Les Salons. Le cadre historique et élégant se prête parfaitement au jeu et contribue à l’atmosphère frémissante qui accueille le public. Au centre de la scène, un piano baigne dans la lumière tamisée de 2000 bougies. La pénombre participe étrangement à assourdir les sons autant que les couleurs, et au lieu du bavardage caquetant qui envahit généralement les salles de spectacle avant la représentation, à peine surprend-on çà et là quelques murmures intrigués. Le jeune pianiste, Franck Laurent-Grandpré, semble un peu décontenancé de découvrir une salle moins remplie que ce qu’il attendait (la faute conjointe au Covid et à l’heure tardive sans doute, la représentation débutant à 21h30) mais s’amuse de ce « petit comité » et s’exécute avec le sourire, n’hésitant pas à faire précéder chaque pièce musicale d’une courte introduction humoristique.

Photo: Luc Faure

On redécouvre ainsi les compositions les plus iconiques de John Williams, de Star Wars à Jurassic Park en passant par La Liste de Schindler, toutes réimaginées pour piano solo. Laurent-Grandpré allie la sensibilité à la virtuosité, laissant d’abord entendre le thème épuré, avant de le redessiner avec passion, à la manière d’une série de variations ornées, où la ligne principale au loin surnage. Certaines pièces – on pense notamment à la bande-son d’Harry Potter – prennent une couleur particulièrement féerique dans la lumière vacillante des chandelles. On regrettera seulement peut-être que l’ampleur symphonique des pièces de John Williams, dont beaucoup reposent sur un vaste ensemble de cordes, peine à être restituée par un unique piano. On n’en salue pas moins la performance magistrale du soliste et on se réjouit d’un prochain rendez-vous Candlelight pour aller écouter des pièces au style légèrement plus intimiste. 

Concerts Candlelight 
Fever 
Tout l’été 
www.feverup.com/geneve/candlelight 

Your Fault portrait ©MarySmith_Marie Taillefer

Culture estivale à Lausanne

La plateforme CultureDebout! recense toutes les actions et initiatives mises en place en un temps record par la scène culturelle lausannoise. Rivalisant de créativité, elle vous propose cet été un programme inédit et majoritairement gratuit dans des conditions respectueuses des normes sanitaires.

Texte: Sandrine Spycher

Un des rendez-vous phares de l’été lausannois est, depuis de nombreuses années, Le Festival de la Cité. Annulé à cause de la pandémie de coronavirus, il vous donne rendez-vous pour sa version revisitée, Aux confins de la Cité, qui se tiendra du 7 au 12 juillet 2020. Les différents lieux, choisis avec attention afin de respecter les normes sanitaires tout en garantissant une expérience de spectacle enrichissante, ne sont dévoilés qu’aux participant·e·s. En effet, les projets, in situ ou sur des scènes légères, ne sont accessibles que sur inscription. C’est donc après tirage au sort que les chanceux et chanceuses pourront profiter de spectacles de danse, théâtre, musique et bien plus encore Aux confins de la Cité!

Pour ce qui est des arts de la scène, L’Agenda conseille, au cœur de cette riche sélection, la pièce Sans effort de Joël Maillard et Marie Ripoll. Déjà présenté à l’Arsenic en octobre 2019, ce spectacle est un joyau de texte et de créativité, qui explore les questions de la mémoire humaine et de la transmission entre générations. Côté musique, vous retiendrez notamment la pop velours de Your Fault, projet de Julie Hugo (ancienne chanteuse de Solange la Frange). Cette musique aux notes envoûtantes ne manquera pas de rafraîchir la soirée à l’heure où le soleil se couche. Enfin, pour apporter une touche grandiose dans ce festival, Jean-Christophe Geiser jouera sur les Grands Orgues de la cathédrale de Lausanne. Ce monument symbolique de la Cité où se déroulent les festivités contient le plus grand instrument de Suisse, que l’organiste fera sonner. Bien d’autres projets et spectacles seront présentés au public inscrit. En prenant soin de respecter les consignes sanitaires, on n’imaginait tout de même pas une année sans fête à la Cité !

Your Fault portrait ©MarySmith_Marie Taillefer
Your Fault, © MarySmith : Marie Taillefer

Les cinéphiles ne seront pas en reste cet été grâce aux différentes projections, par exemple dans les parcs de la ville. Les Toiles de Milan et les Bobines de Valency ont repensé leur organisation afin de pouvoir offrir un programme de films alléchant malgré les restrictions sanitaires. Les Rencontres du 7e Art, ainsi que le Festival Cinémas d’Afrique – Lausanne se réinventent également et vous invitent à profiter de l’écran en toute sécurité. La danse sera également à l’honneur avec la Fête de la Danse ou les Jeudis de l’Arsenic, rendez-vous hebdomadaires au format décontracté, qui accueillent aussi de la performance, du théâtre ou encore de la musique.

La plupart de ces événements sont rendus possibles grâce au programme RIPOSTE !. Selon leurs propres mots, RIPOSTE !, « c’est la réponse d’un collectif d’acteurs culturels lausannois pour proclamer la vitalité artistique du terreau créatif local ». L’Esplanade de Montbenon et son cadre idyllique avec vue sur le lac Léman a été choisie pour accueillir, chaque vendredi et samedi en soirée, une sélection de concerts, films en plein air et performances de rue. L’accès y sera limité afin de respecter les mesures sanitaires.

L’Agenda vous souhaite un bel été culturel !

Informations sur culturedebout.ch


 

Adriano Koch: “Lone” mais bien entouré

Hier soir au Romandie, L’Agenda était au vernissage de l’album Lone du jeune pianiste Adriano Koch, que nous avions rencontré en été 2018 à l’occasion de la sortie de son premier album. Lone, troisième et dernier en date puisqu’il sort aujourd’hui-même, chemine toujours au travers d’inspirations classiques, jazz, électro et de sonorités israéliennes et arméniennes, avec quelques nouveautés.

Texte: Katia Meylan

Photo: Valentin Cherix

Lone, paru chez Irascible, porte bien son nom car il est le fruit d’un travail solitaire, pour la composition comme pour l’enregistrement. Sur d’autres plans de la réalisation de ce projet le talentueux pianiste est toutefois bien entouré, comme ce soir dans la salle du Romandie, où il prend un moment pour remercier les artistes, les programmateurs et les proches qui participent à son succès.

Ce qu’on remarque en premier lieu dans Lone est que l’artiste intègre à sa musique un élément nouveau, la voix. Hier en live, un micro rajoutait un paramètre de plus au piano, à la percussion et aux machines qu’il gère seul. Sur certaines chansons sa voix se fait comme un écho crié au loin, sur d’autres il chante un motif répétitif. “Quand un élément humain vient s’insérer dans l’instrumental, ça touche le public différemment”, nous fait constater Adriano lorsqu’on lui demande d’où vient l’envie d’ajouter des voix à sa musique. “De mon côté ça me permet de mieux rentrer dans un état de flow”, ajoute-t-il encore.

Photo: Katia Meylan

Une réflexion qui s’apparente à celle qui s’est imposée à nous au sujet de la lumière; au début du concert, les spots puissants en contre-jour laissaient planer le mystère, puis dès la deuxième chanson, l’éclairage fait apparaître l’humain. On admire ainsi le pianiste tout à sa musique, jongler avec plusieurs instruments. La création lumière, travaillée et rythmique, est partie intégrante du concert et ajoute une épaisseur d’interprétation.

L’instrument lui aussi attire l’attention et on aime à imaginer qu’il rassemble les différents univers d’Adriano Koch: sa carrure de piano droit en bois fait penser à l’apprentissage de la musique classique, le fait qu’il soit ouvert avec les cordes et les marteaux apparents serait comme une improvisation personnelle propre au jazz, et l’éclairage bleu représenterait l’électro.

 

Parti dans ce genre de pensées insolites, on reste néanmoins à l’écoute de la musique, où l’on décèle une note répétée obsédante sur plusieurs morceaux qu’on retrouvait déjà dans les premières compositions. Peut-être une marque de fabrique? Et dans chaque titre, tant d’amplitude; Quand le classique prend l’ascendant il est vite nuancé par un vocabulaire oriental ou un phrasé jazz. L’électro amène des moments intenses où le public commence à se met en mouvement, puis soudain retour au calme, et l’on entend la voix d’un homme à côté souffler “c’est beau!”. C’est vrai!

LONE
Sortie le 6 mars 2020

Sur Spotify: www.open.spotify.com/artist/

Prochaine date de concert:
Jeudi 26 mars à 21h, Le Bar King, Neuchâtel
www.adrianokoch.com

 

(Pour un petit retour en arrière: l’article au sujet d’Adriano Koch dans L’Agenda n°75, septembre-octobre 2018 www.l-agenda.online/archives en p. 30)

Du hip-hop en béton

Cela fait maintenant quelques années que la culture hip-hop renaît de ses cendres en Suisse romande. Nombreux·ses sont les artistes qui osent se lancer sur la scène artistique francophone et deviennent de flamboyant·e·s représentant·e·s urbain·e·s made in Switzerland. Le Festival Transforme, qui aura lieu le 27 juin au Centre de Formation Professionnelle de Ternier à Lancy, est un projet alliant une participation active des jeunes apprenti·e·s qui l’organisent et la culture dont ils se rapprochent le plus, le hip-hop new school.

Texte: Giovanna Santangelo

Qui n’a jamais entendu le principe traditionnel et endurci qui disait que les grandes études valaient mieux que tout le reste, sous prétexte qu’elles seules permettaient d’ouvrir les meilleures portes de la vie laborieuse. Transforme constitue la clôture d’un projet plus général de valorisation de l’apprentissage dans le canton de Genève, qui tend  justement à lutter contre ces préceptes archaïques.

L’aspect participatif est ce qui est le plus mis en avant. Les nombreuses créations des apprenti·e·s réalisées tout au long du semestre ont une fonction concrète lors du festival. Le flyer est confectionné par des étudiant·e·s en graphisme et design, l’enseigne “TRANSFORME” est taillée dans le bois par les apprenti·e·s en menuiserie, et le bar en béton est réalisé par celle et ceux en maçonnerie. Cet événement est créé pour eux et géré par eux. L’autre but, c’est d’intéresser les plus jeunes, les 12-15 ans, qui à l’heure du choix pour déterminer leur futur parcours, auront l’occasion d’être plus informé·e·s sur l’amplitude de formations professionnelles existantes et indispensables dans la vie de tous les jours. En mettant en scène l’offre culturelle dans un projet open-air consacré au hip-hop, on attire un public dynamique composé des futur·e·s protagonistes du monde professionnel de demain.

Cette année, un programme paritaire est annoncé. Il y aura autant d’artistes féminines que de rappeurs masculins qui se produiront sur la scène musicale. De plus, la tête d’affiche du festival est une femme, elle aussi. IAMDDB incarne le nouvel espoir  de l’urban jazz anglo-saxon et à seulement 23 ans, elle compte déjà trois albums à son actif. En restant dans le même répertoire de genre mais de manière plus régionale, seront présentes aussi Women At Work, un collectif pluridisciplinaire prônant notamment le rap engagé dans leurs textes, et aussi Ella Soto, la star suisse polyvalente de R’n’B lo-fi.

Issus de la scène française cette fois-ci, on retrouvera 13 Block, quatuor masculin constituant un phénomène explosif de la trap francophone actuelle et Dosseh, figure immanquable du rap qui enchaîne les collaborations avec des grands noms tels que Booba, Seth Gueko ou encore Youssoupha. La petite touche locale sera amenée par Rouhnaa & Gio Dallas, deux jeunes artistes de la nouvelle génération du rap genevois.

En plus de l’aménagement d’un skatepark et de démonstrations de parkour qui avaient déjà fait fureur l’année passée, d’autres nouveautés sont prévues pour la deuxième édition de Transforme. Il sera possible d’assister à un défilé fusionnant mode streetwear et danse et à un open mic libre rythmé et organisé par le collectif La Ruelle.

Rendez-vous à Transforme pour célébrer le début de l’été dans une atmosphère débordante d’artistes underground prometteur·s·es.

Festival Transforme

Le jeudi 27 juin au centre de formation professionnelle de Ternier de Lancy, Genève

https://festival-transforme.ch

Midnight in the Docks

Qu’ont en commun la BO de Titanic, “I Will Survive” ou encore “Nothing Else Matter” de Metallica?
Ce sont des hits des ’20ies!
… pas exactement, mais le Postmodern Jukebox pourrait tout aussi bien nous le faire croire. Passés à travers les arrangements du pianiste et fondateur du groupe Scott Bradlee, les tubes des dernières années, tous genres musicaux confondus, prennent une teinte délicieusement vintage. L’orchestre était au Docks hier soir, a tout donné, a rendu Lausanne fou!

Texte: Katia Meylan

L’affiche ayant attiré de nombreux amateur-trice-s, on serpente patiemment dans la file et on arrive dans la salle alors que le concert a déjà commencé depuis quelques minutes. L’ambiance: euphorique bien qu’encore un peu timide du côté du public – comme souvent dans les concerts de nos contrées, détrompez-moi peut-être – mais ça n’a été qu’une question de temps!

En scène, le maître de cérémonie nous présente la toute dernière vocaliste ayant rejoint la tournée. Tia Simone a apparemment décidé de ne pas se ménager pour sa première chanson de la soirée, et la puissance dans sa voix nous fait tout de suite comprendre pourquoi elle a rejoint l’orchestre.
PMJ, comme on appelle aussi le collectif, a la particularité de compter plus d’une cinquantaine d’artistes qui se produisent en alternance. Au Docks, on a la chance de rencontrer, en plus des musiciens attitrés (piano, guitares, contrebasse, batterie, trombone, saxophone) les chanteuses Hannah Gill et Olivia Kuper Harris, et le danseur de claquettes Caley Carr. LaVance Colley, le maître de cérémonie, présente les artistes, s’assure que le public va bien entre deux chansons.

https://www.facebook.com/LAgenda16/videos/256438921775183/

Olivia Kuper Harris en battle avec le trombone

C’est “Creap” de Radiohead et “All About That Bass” de Meghan Trainor qui ont le plus la cote auprès des Suisses sur YouTube, nous apprend-il encore. Mais dans la salle, chaque chanson remporte son petit succès. Après une reprise de “Feel it Still” du groupe Portugal The Man par les trois chanteuses, qui gardent le côté dansant du titre et le recouvrent de velours, LaVance Colley s’avance et reçoit autant d’acclamations et sifflements admiratifs que les femmes juste avant lui. Et on a bien fait, car on ne le savait pas encore, mais… il allait entonner “Halo” de Beyoncé. L’émotion se diffuse et prend même le dessus sur la performance – qui n’est pourtant pas des moindres puisque le vocaliste traverse plusieurs octaves, donnant à chacune ses nuances.

Les yeux fermés, nous étions partis dans nos mondes, que ce soit sur “Halo” ou sur Metallica, mais l’orchestre a vite fait de nous secouer avec quelques titres bien swing qui nous font revenir aux Docks comme ils auraient été il y a cent ans. Entre chaque changement de costumes scintillants et duveteux, aussi à l’aise au chant qu’à leurs instruments où à la danse, ces showmen et showgirls ont épaté Lausanne, qui crie, tape des mains et en aurait redemandé toute la nuit!

Pour les globe-trotters qui les auraient manqués hier soir, ils sont ce soir à Girona en Espagne, dimanche à Bologne, mardi à Munich… et ainsi de suite, tout leur programme sur: www.postmodernjukebox.com

Boulevard des airs

C’est l’histoire d’une bande de potes aux mêmes goûts musicaux. Ils ont la chance de s’unir en 2004 pour vivre pleinement de leur passion. Chaque membre est important dans ce groupe home made qui compose, écrit, enregistre, produit, arrange et réalise lui-même ses albums. Récompensés lors de la 34e édition des Victoires de la Musique grâce au titre original “Je me dis que toi aussi”, les musiciens ont partagé leurs bonheurs sur scène le 1 mars dernier à la Salle des Fêtes de Thônex.

Texte: Jenny Raymonde

J’ai découvert ce groupe avec la chanson “Bruxelles” pendant l’automne 2015 alors que je rentrais pour un week-end  voir ma famille, justement à Bruxelles. Au début du spectacle, Sylvain dit “Ça fait plaisir de voir des têtes connues qui nous ont déjà vus à Genève, à Montjoux”, et pourquoi pas à Bruxelles, en octobre 2016, pour la précédente tournée incroyable Bruxelles Tour.

Le public composé d’enfants, d’adolescent·e·s, de jeunes, d’adultes et des personnes plus âgées, regarde, chante, tape dans les mains ou avec les pieds, il fait ce qu’il lui plait, pour se faire entendre et participer au concert avec l’orchestre.

Les musiciens emmènent avec eux tous les grains de sable de la salle pendant 1h30 avec un mix entre les morceaux du nouvel album et les plus anciens.

Le temps a filé en douce et nous aimerions qu’ils restent encore un peu avec nous à Thônex.

Ils nous laissent en assurant que “quand les jours seront pourris, qu’il fera froid, qu’on déprimera, ils se rappelleront de l’ambiance de la salle de Thônex” et je me dis que nous aussi palapala palapala palapala palapala …

Ils reviendront dans nos contrées le 5 juin à Nyon pour le Caribana Festival, et le 15 août à Avenches lors du festival Rock Oz Arènes.

www.bda-boulevarddesairs.com