Le jeune humoriste parisien est venu jouer son spectacle Alors en terres genevoises vendredi dernier. Bref récit d’un phénomène humoristique d’à peine 25 ans.
Texte: Yann Sanchez
Par où commencer? Pour celles et ceux qui ne connaissent pas du tout le phénomène Roman Frayssinet, je m’occupe de faire les présentations. Humoriste parisien pas comme les autres, il a été professionnellement formé à l’humour de l’autre côté de l’Atlantique, au Québec. Diplômé de l’École nationale de l’humour de Montréal à 20 ans, il a fait ses armes au pays de Céline, puis est revenu s’installer à Paris suite à sa rencontre avec un certain Kyan Khojandi. Son style d’humour? Certain·e·s diront qu’il fait de l’absurde mais lui préfère dire qu’il essaie de repérer l’absurdité dans ce monde. Nuance. Il a un côté légèrement schizophrène, ils seraient trois dans sa tête à en croire sa capsule web Migraine et il adore placer son personnage de scène du côté de celui qui découvre, celui qui ne connaît pas. Ses points de vue sont souvent décalés, voire marginaux, son personnage semble totalement déjanté mais ses propos font toujours sens.
C’est à guichets fermés qu’il vient se présenter vendredi soir dans l’enceinte du Théâtre du Léman. Accompagné de deux premières parties, son compatriote Ahmed Sparrow et Nadim Kayne, humoriste made in Geneva, les premiers rires tombent rapidement et la salle se réchauffe gentiment. Roman entre en jeu et il est définitivement disposé à mettre le feu sur scène. D’emblée, il aborde le sentiment nostalgique de la liberté de l’enfance, puis la période traumatisante de l’adolescence et enfin la vie d’adulte qui, elle non plus, n’est pas un cadeau. Les thèmes sont universels, la vie, l’amour, le sexe, la mort, la jeunesse, la vieillesse, le monde, la nature, l’environnement et les animaux. Le parti pris est de parler au plus grand nombre, faire de l’humour intemporel pour toutes les générations et, à en croire le public autour de moi, le pari est réussi.
La prestation de Roman est hallucinante, sur scène il est aussi à l’aise qu’un poisson dans l’eau, on sent qu’il est fait pour ça et pour absolument rien d’autre. Son esprit est tourmenté et fasciné par des choses simples de la vie qu’il arrive à rendre complexes par les raisonnements les plus farfelus qui soient. C’est là que vient le rire et honnêtement l’audience doit souvent se demander « Mais comment a-t-il pu penser à ça? » et « Où va-t-il chercher tout ça? ». Son imaginaire semble illimité, il est totalement imprévisible et de fait, personne ne peut anticiper ses chutes. Effet de surprise garanti!

Le garçon est extrêmement talentueux, un véritable technicien de l’humour qui détonne dans un paysage du stand up français souvent décrié pour sa tendance aux blagues communautaires un tantinet récurrente. Même si la nouvelle vague d’humoristes francophones se diversifie et promet un brillant futur à sa discipline, il sort du lot de par son originalité, son caractère et sa science du rire. Ses années montréalaises ont dû aider.
Au final, j’ai passé une heure et demie à rire et le reste des spectateur·trice·s aussi. En atteste la standing ovation immédiate qu’il a reçu à la fin du show. Roman a semblé apprécier la ferveur du public helvète puisqu’il a décidé de nous offrir en rab dix bonnes minutes de nouveau matériel qu’il commence à rôder en tournée. Ce grand enfant qu’il est quitte finalement les planches sur une chanson de son ami Antoine Valentinelli, dit Lomepal, au refrain qui sonne comme une devise: « Prends cette putain de vie comme un jeu, je suis encore un môme (…) môme jusqu’à la mort, y a aucun remède ».
Prochaines dates:
Mercredi 1er avril à 19h au Théâtre de Beausobre, dans le cadre du festival Morges-sous-rire.
Il nous a annoncé en exclusivité qu’il sera de retour le 8 octobre 2020 à Genève. Affaire à suivre!